Musique recommandée pour la lecture Badmarsh & Shri - Dancing Drums
le premier exemple complet d'analyse morphologique date de 2005 et était basé sur le modèle numérique de Terrain MNT du Sri Lanka. Ce MNT utilisait les données SRTM (Shuttle Radar Terrain Mission) collectées en 2000 puis affinées pendant des années. Chaque pixel de la grille correspond à un carré de 30 mètres de côté et comprend une altitude qui peut être utilisée pour diverses manipulations mathématiques. Voici quelques exemples de représentation du bâti géographique: le premier a un code couleur automatique qui passe du vert clair an bleu foncé selon l'altitude; le deuxième a un code automatique de couleur avec la mer en bleu, les zones les plus basses en noir s'éclaircissant vers les zones les plus élevées; Le troisième est construit sur des ruptures dans la distribution des altitudes et devrait permettre une lecture plus déductive...
Une analyse du paysage commence par l’identification des seuils significatifs qu’il s’agit de définir avant toute analyse en profondeur. L’histogramme indique l’importance de chaque altitude dans le MNT. Dans le cas du Sri Lanka, une ile entourée par la mer, il n'y a bien sûr pas d'autres effets de bord que la limite entre terre et mer, qui a en principe une origine que la géomorphologie devrait envisager.
La valeur de chaque noeud varie de 0 à plus de 2500 mètres, sa fréquence entre 0 et 1'250'000, illustré par cet histogramme qui montre l'importance énorme des basses-Terres mais ne permet aucun commentaire pour les altitudes supérieures à 200 mètres. Or cela représente 85% du volume total du Sri Lanka, une quantité qu'il serait absurde de négliger. Essayons de représenter le logarithme de la fréquence des altitudes...
Les altitudes varient toujours entre 0 et 2500 mètres, mais celles du logarithme de la fréquence ne varient plus qu'entre un peu plus de 1 et un peu moins que 6, ce qui signifie qu'il y a plus de 4 ordres de grandeurs de différence entre la fréquence des différentes altitudes.
Il est évident que le logarithme de l’altitude doit être une courbe continuellement croissante. Par contre, le logarithme de la fréquence croit plus rapidement que l'altitude au début (surreprésentation des altitudes basses), change d’ordre de grandeur vers 180 mètres, puis de nouveau vers 600 mètres avec une pente reltivement droite, vers 1900 mètres et finalement vers 2100 mètres et enfin vers 2350 mètres. A chaque changement d’ordre de grandeur doit correspondre une modification radicale du contexte géomorphologique. Ce qui s'observe sur cette représentation en radar se voit-il aussi sur un histogramme plus classique du logarithme de la fréquence de la hauteur?
Il est évident que le logarithme de l’altitude doit être une courbe continuellement croissante. Par contre, le logarithme de la fréquence croit plus rapidement que l'altitude au début (surreprésentation des altitudes basses), change d’ordre de grandeur vers 180 mètres, puis de nouveau vers 600 mètres avec une pente reltivement droite, vers 1900 mètres et finalement vers 2100 mètres et enfin vers 2350 mètres. A chaque changement d’ordre de grandeur doit correspondre une modification radicale du contexte géomorphologique. Ce qui s'observe sur cette représentation en radar se voit-il aussi sur un histogramme plus classique du logarithme de la fréquence de la hauteur?
La ligne jaune représente une distribution logarithmique normale des altitudes, et voici qu'apparaissent une certaines quantité de creux et de bosses qu'il faut interpréter: l’histogramme classique du logarithme des altitudes va révéler ses seuils significatifs. La ligne jaune permet de repérer les pics significatifs à 180, 550 – 600, 1900 et 2200 mètres, de même qu'une pente assez plate entre 700 et 1350 mètres. Ce qu’il faut retenir de ce petit exercice, c’est que la nature ne correspond jamais à nos petits découpages bureaucratiques genre tous les 100 ou tous les 500 mètres…
Que signifie le plateau entre 700 et 1350 mètres? Des logarithmes qui s'alignent le long d'une droite n'ont pas une répartition linéaire mais exponentielle. Il y a donc une réduction rapide au début puis une diminution plus lente des fréquences d'altitude, autrement dit les altitudes plus basses tendent asymptotiquement vers un niveau d'équilibre: une érosion généralisée abaisse tout un secteur vers un niveau de base régional qui se trouve pour l'instant aux environs de 700 mètres. Notez la grande différence de pente entre les altitudes entre 700 et 1350 mètres et entre 2200 à plus de 2500 mètres - il faudra probablement évoquer deux explications fondamentalement différentes pour ces deux pentes.
Que signifie le plateau entre 700 et 1350 mètres? Des logarithmes qui s'alignent le long d'une droite n'ont pas une répartition linéaire mais exponentielle. Il y a donc une réduction rapide au début puis une diminution plus lente des fréquences d'altitude, autrement dit les altitudes plus basses tendent asymptotiquement vers un niveau d'équilibre: une érosion généralisée abaisse tout un secteur vers un niveau de base régional qui se trouve pour l'instant aux environs de 700 mètres. Notez la grande différence de pente entre les altitudes entre 700 et 1350 mètres et entre 2200 à plus de 2500 mètres - il faudra probablement évoquer deux explications fondamentalement différentes pour ces deux pentes.
4 représentations de la même réalité traitée selon 4 points de vue différents, dont 3 basées uniquement sur une exploration des fréquences d'altitudes ! La carte gémorphologique, qui est une interprétation de la nature, intègre tous ces résultats. Aurons nous le même succès en explorant la pente ou l'exposition de chaque pixel?
La carte des pentes du Sri lanka (en jaune figure la ligne sur laquelle a été préparée une coupe un peu plus loin) et sa légende appellent les commentaires suivants: Une grande partie du pays a une pente très faible, de l'ordre de quelques fractions de degrés. Les parties plus élevées sont caractérisées par des pentes de quelques degrés, et seuls quelques sommets ont des pentes fortes.
Comme l'histogramme du logarithme de la fréquence des altitudes, celui du logarithme de la fréquence des pente permet des observations intéressantes. Une courbe de tendance de second degré a été extraite du tableau excel, dont l'équation a un coefficient de corrélation R² de 0.985.
On voit que les angles entre 0 et 3 degrés seraient sur représentés, alors que ceux entre 3 et 19 degrès seraient sous représentés. Les pentes supérieures à 60 degrés ont une distribution plus erratique.
L'abondance des pentes très faibles peut être liée au régime des eaux de surface qui occupent les dépressions dans lesquelles une intense sédimentation fine prend place. Cela indique également que le niveau de la mer actuel est plutôt élevé puisque les eaux peinent à quitter l'île.
On voit que les angles entre 0 et 3 degrés seraient sur représentés, alors que ceux entre 3 et 19 degrès seraient sous représentés. Les pentes supérieures à 60 degrés ont une distribution plus erratique.
L'abondance des pentes très faibles peut être liée au régime des eaux de surface qui occupent les dépressions dans lesquelles une intense sédimentation fine prend place. Cela indique également que le niveau de la mer actuel est plutôt élevé puisque les eaux peinent à quitter l'île.
Dans cette coupe figure en rouge l'altitude en mètres et en vert la pente en degrés. La coupe montre la section surélevée au centre avec deux plaines d'érosion s'étalant vers la mer. Vers 180 mètre se concentrent une première série de pentes plus fortes, puis entre 500 et 1500 mètres (relief important), entre 500 et 1100 mètres (second relief important) avec au centre une vallée aux pentes relativement importantes soumises à une importante érosion régressive.
Sur cette figue est représentée l'orientation de chacun des carrès de 30 mètres de coté. Elle est répartie en 256 classes
15 valeurs - qui ne représentent que 5% des valeurs fournissent 15.4% des fréquences totales, les fréquences les plus élevées étant généralement entourées de fréquences très faibles. Les orientations les plus fréquentes sont O, NE, N, SE, SO, NO, E, S, OSO, ENE, ONO, NNE, NNO, SSO, SSE. 74 valeurs, soit 29% des valeurs possibles, sont plus fréquentes que la moyenne alors que 182 valeurs, soit 71% des valeurs, sont moins fréquentes que la moyenne, ce qui indique une répartition inégale des orientations. Les azimuths 75°, 111°, 253° et 293° sont de premier ordre, ceux de 20°, 138°, 164°, 202 et 341° de second ordre. Le plus étonnant est l'orientation d'azimuth 111° qui est très importante mais inexistante vers son complémentaire à 291°. |
L'orientation Est est plus fréquente que l'orientation Ouest alors que les orientations Nord-Sud, ENE et ESE montrent une asymétrie impotante le long de ces axes. L'orientation des carrés de 30 mètres du MNT SRTM au Sri Lanka sont majoritairement orienté vers l'ENE.
Une synthèse intermédiaire: à ce stade nous avons trouvé des seuils significatifs parmi les altitudes, constaté une répartition normale des pentes sauf pour les plus petites et une tendance générale à pencher vers l'ENE. Pouvons nous construire une histoire géomorphologique sur ces éléments?
Voici la figure du logarithme des fréquences du MNT SRTM avec la courbe de distibution normale.
A titre de comparaison, voici la courbe du logarithme des fréquences du MNT basé sur les données ASTER, un MNT plus précis qui a été développé plus tard..
Voici une carte de quatre environnements distincts, les basses-Terres en dessous de 180 en bleu, qui soulignent les processus d'érosion des Hautes Terres figurées en vert, Le massif central est illustré en brun avec les parties les plus élevées en gris et blanc, qui correspondrait aux restes d'une pénéplaine fossile.
Quelques lignes rouges suffisent-elles à proposer une explication cohérente de l'organisation d'un paysage résultant de l'affrontement entre forces tectoniques qui poussent vers le haut et processus chimiques qui ramènent la matière vers la mer?
Quelques lignes rouges suffisent-elles à proposer une explication cohérente de l'organisation d'un paysage résultant de l'affrontement entre forces tectoniques qui poussent vers le haut et processus chimiques qui ramènent la matière vers la mer?
Ci-dessus une interprétation des principales ruptures de pente du MNT ASTER puisqu'à chacune correspond un changement plus ou moins complet du système érosif dévorant les roches en place, les longs plateaux aux pentes plus ou moins horizontales correspondant à des cycles d’érosion évoluant vers une lente maturité morphologique sur des millions d’années. Il y aurait donc de gauche à droite
1) une accumulation de sédiments entrainés vers la mer par les systèmes sédimentaires actifs depuis le Pleistocène le long des rivières et des plaines alluviales (0 - 180 mètres);
2) Une érosion active plus particulièrement entre 500 et 650 mètres sur les versants exposés aux pluie orographiques (cf plus loin);
3) Une érosion attaquant un vieux socle peu résistant à l'érosion entre 700 et 1350 mètres qui formait une vaste plaine d'érosion avant d'être réactivé tectoniquement ;
4) Une érosion affectant le même vieux socle plus résistant à l'érosion entre 1700 et 1900 mètres (cf carte géologique 3D):
5) Un plateau basculé par le soulèvement alpin lors de la collision de l'Inde avec l'Asie au delà de 2100 mètres; enfin, 6) sur les parties plus élevées peuvent être supposées les restes d'une pénéplaine (inselbergs?) qui aurait succédé à l'orogenèse panafricaine, ce qui est bien une origine radicalement différente de la déformation d'âge alpin décrite ailleurs sur l'île.
1) une accumulation de sédiments entrainés vers la mer par les systèmes sédimentaires actifs depuis le Pleistocène le long des rivières et des plaines alluviales (0 - 180 mètres);
2) Une érosion active plus particulièrement entre 500 et 650 mètres sur les versants exposés aux pluie orographiques (cf plus loin);
3) Une érosion attaquant un vieux socle peu résistant à l'érosion entre 700 et 1350 mètres qui formait une vaste plaine d'érosion avant d'être réactivé tectoniquement ;
4) Une érosion affectant le même vieux socle plus résistant à l'érosion entre 1700 et 1900 mètres (cf carte géologique 3D):
5) Un plateau basculé par le soulèvement alpin lors de la collision de l'Inde avec l'Asie au delà de 2100 mètres; enfin, 6) sur les parties plus élevées peuvent être supposées les restes d'une pénéplaine (inselbergs?) qui aurait succédé à l'orogenèse panafricaine, ce qui est bien une origine radicalement différente de la déformation d'âge alpin décrite ailleurs sur l'île.
La carte géologique du Sri lanka permet de répondre à certaines questions ou de confirmer certaines hypothèses. En rose sont figurés des roches précambriennes au faciès principalement amphibolitiques, qui résistent très mal à l'altération sous climat tropical humide. Par contre, le massif central est composé de roches qui ont un facies granulitique nettement plus résistantes à l'érosion. Le drapage de la carte géologique sur le MNT SRTM illustre très bien la différence de résistance à l'érosion et confirme indirectement les hypothèse pour les zones situées entre 700 et 1350 mètres (socle plus tendre) et au dessus de 1900 mètres (socle plus dur)
Les pentes figurées en rouge sont superposées sur cette image LandSat en vraies couleurs: Il est frappant de voir que les nuages s'accumulent au dessus des concentrations de pentes les plus raides, ce qui confirme l'hypothèse des pluies orographiques qui affectent surtout les zones situées entre les basses-Terres et le massif central entre 700 et 1350 mètres d'altitude.
Les pluies orographiques affectent les masses d'air humides venant de la mer. dont l'ascension sur des reliefs importants provoque une condensation et une pluie importante sur le versant exposé vers la mer, vers l'ESE au Sri lanka, qui subit donc une érosion plus importante que les versants secs derrière les reliefs.
Une étude combinant analyse des pentes et de l'altitude produit un résultat intéressant, la même recette appliquée à la carte ci-dessus en jouant cette fois ci sur la transparence de la couche des pentes permet la production de cartes visuellement attractives. Une réflexion sur le meilleur moyen de tirer parti de ces combinaisons est proposée dans la section suivante.